Je pensais aux gens sur Genève qui se sont précipités chez Macdo dès qu'ils ont eu la possibilité de sortir. Au tout début moi aussi je regardais à cette histoire avec dégout et méprise. Le burger chez Macdo est une merde et a le gout des chaussettes laissées à pourrir après une séance de fitness, on est d'accord. Après aujourd'hui je lavais mes assiettes et je nettoyais la cuisine, j'essayait d'arriver à faire sortir toute les incrustations et le sale des tuyaux. Je pensais alors à la nécessité de contact avec la matière et le fait de se salir le main et l'esprit, et j'ai pensé que le sentiment d'auto-destruction après des privations, des manques, la peur, avec une perspective encore ouverte sur ce qui va se passer, c'est compréhensible, ça peut arriver. Et ça peut être accompagné par la nécessité d'oublier. Et quoi de mieux de se remplir le ventre et ne vouloir plus rien savoir, de se jeter sur un morceau de la civilisation de merde qu'on a créé et essayer de n'avoir plus peur. Quoi de mieux que de s'annuler. En plus je pensais, bon, ces gens n'ont pas trop d'argent pour aller dans un grand resto - et c'est encore fermé - et ils n'ont pas eu la possibilité de lire et de s'informer, ils n'ont pas les connaissances et la conscience pour par exemple penser au système capitaliste globale, ou d'avoir le réflexe de s'acheter des produits bio chez un fermier à la montagne qui cultive ses salades bio (tout en utilisant sa propre caca paysanne originelle) et, encore, plus fort encore, ces gens veulent seulement jouir comme des cochons sauvages libérés dans la foret qui tombent sur un paquet de truffes et les dévorent sans penser aux bonnes manières. Ils s'en foutent totalement, ils ont faim.
Finalement, c'est facile de juger et regarder le peuple et de le dire grossière, ignorant et sauvage, c'est facile de le regarder se réjouir de se remplir le ventre avec de la bouffe de merde pendant que nous mangeons notre salade bio moche, mais - mes couilles - probablement c'est aussi la faute des gens qui sont là à juger et qui n'arriveront jamais à parler avec quelqu'un qui mord avec gout son bigmac et qui t'envoi à te faire foutre si tu lui fais la morale. Et puis quelle belle sensation de se marrer de ces gens qui vont chez macdo, ça nous remplit pas le ventre, mais putain, on se sent meilleurs, n'est-ce pas ?
Arrêter de faire la morale peut faire du bien à tout le monde.
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