Chaque jour de bullshit job j'aimerais me jeter par la fenêtre pour le désespoir. J'imagine alors Enrico Matteo Comte de Thurn-Valsassina qui dit : « Prenez-le et jetez-le par la fenêtre, il est en train de gaspiller sa journée et sa vie ! ». Heureusement j'habite au rez de chaussée et il n'y a pas de letame en bas de chez moi, donc je remonte vite dans mon appartement. Je me confronte à l'étonnement du Comte de Thurn. Pris de soubresaut, il répète à ses hommes : « Prenez-le et jetez-le par la fenêtre ! Il gaspille sa vie et sa journée et il ne veut pas se renseigner à faire un saut par la fenêtre ! ». Alors ils me prennent et me lancent à nouveau par la fenêtre. Mais moi j'habite encore au rez de chaussée, donc rien m'arrive. Mais cette fois je prends un moment pour moi avant de rentrer. Je parle avec le concierge, je parle avec un voisin. Mais enfin je rentre chez moi. Là Enrico Matteo Conte di Thurn-Valsassina encore plus étonné me regarde un long moment, prisonnier de l'histoire il n'arrive pas à comprendre ce qui est en train de se passer et pourquoi moi je ne veux pas rester dehors lancé par la fenêtre. Alors il dit à nouveau : « Prenez-le et jetez-le par la fenêtre. Il insiste à rester vivant même s'il est en train de gaspiller sa journée et sa vie ! Il ne mérite pas le temps et l'histoire ! ». Ils me prennent et me lancent dehors. Mais moi j'habite encore au rez de chaussée. Je reste devant la fenêtre et je regarde à l'intérieur. Enrico Matteo Conte di Thurn-Valsassina s'est désormais installé chez moi, il boit mon café, il mange mes biscuits, il partage mon chocolat avec ses hommes. Moi je regarde sa vie se passer. Si je rentre encore une fois, après un moment d'étonnement qui se répétera encore et encore, il va donner l'ordre de me jeter dehors à nouveau et toujours à l'infini. Et moi je passerai à travers la fenêtre et je me retrouverai toujours dehors à regarder le Comte boire mon café, prendre quartier chez moi, installer un nouveau régime, lancer une révolution en Bohême. C'est la raison de son histoire et de sa vie et de celle de ses hommes. C'est à moi de décider si je veux rentrer encore une fois pour me faire lancer à nouveau par la fenêtre, ou si je veux changer de vie ou finalement d'appartement.